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Vers un retour du taux d’endettement différentiel ?

Le taux d’endettement

Définition

Le taux d’endettement est un indicateur de la solvabilité financière d’un emprunteur.

Le taux d’endettement correspond aux rapport entre les charges (fixes) mensuelles d’un emprunteur et ses revenus (stables) mensuels.

RevenusDépenses
Salaires (ou revenus non-salariés stables)Loyers
Primes régulières (exemple : 13ème mois)Tous les crédits en cours (immo, conso, étudiant)
Revenus locatifs (pondérés à 70 % -ou 80 %, si j’en crois mon dernier coup de fil à ma banquière-).Dépenses incompressibles
AllocationsPensions alimentaires versées
Pensions alimentaires reçues
Rentes et retraites

Les règles en France

Le taux d’endettement maximum accepté par les banques est désormais de 35 % (contre 33 % auparavant) selon les recommandations du Haut Conseil de stabilité financière (HCSF).

Un petit pourcentage de profils peut y faire exception (souvent lorsque ceux-ci disposent de revenus très élevés).

Le taux d’endettement « classique »

La règle de calcul du taux d’endettement actuellement pratiquée par les banques est simplement le ratio entre les charges (fixes, y-compris foncières), et les revenus (stables, y-compris fonciers) :

[Charges] / [Revenus] = [Taux d’endettement]

Le taux d’endettement « différentiel »

Jusqu’en 2021, pour les projets d’immobilier locatif, les banques pouvaient se baser sur une autre méthode de calcul. Elles pouvaient « isoler » un « solde investisseur », qui correspond à la différence entre les charges foncières et les revenus locatifs, puis venir ajouter (en cas de cashflow positif) ou retirer (en cas de cashflow négatif) ce résultat des revenus.

Contrairement au mode de calcul « standard » (dans lequel on intègre les revenus locatifs au niveau des revenus, et les charges locatives aux charges), on va ici calculer la rentabilité des investissements locatifs.

Il y a trois étapes pour calculer le taux d’endettement différentiel :

  1. Calculer le « solde investisseur » : ([Loyers perçus x 0,7] [Charges foncières])) (les revenus fonciers doivent être pondérés à 70 %)
  2. Si le solde est positif, il vient s’ajouter aux revenus. Sinon, il faut le soustraire.
  3. Enfin, divisez vos mensualités de prêts par votre solde investisseur pour obtenir votre taux d’endettement différentiel.

[Charges (non foncières)] /
([Revenus] +/- ([Loyers perçus x 0,7] [Charges foncières]))
= [Taux d’endettement différentiel]

La différence en exemple

Ma situation actuelle

  • Mon salaire mensuel : 3200 € (net avant impôts).
  • Mes revenus fonciers mensuels (hors provision pour charges) : 1 100 €, pondérés à 70 % soit 770 €.
  • Mes charges foncières mensuelles (mensualité de prêt) : 580 €.
  • Mon loyer : 500 €.
ClassiqueDifférentiel
[Charges] / [Revenus] = [Taux d’endettement][Charges (non foncières)] /
([Revenus] +/- ([Loyers perçus x 0,7] – [Charges foncières]))
= [Taux d’endettement différentiel]
(500 + 580) / (3200 + 770) =
27.2 %
770 – 580 = 190 €
500 / (3200 + 190) =
14.7 %

Mon projet

Disons que je souhaite acheter un immeuble 300 000 euros, avec une rentabilité de 9%, donc qui me rapportera 27 000 € / an, soit :

  • Revenu locatif mensuel : 2 250 €, pondérés à 70 % soit 1 575 €./ mois.
  • Mensualité d’emprunt : 1 800 €.
ClassiqueDifférentiel
[Charges] / [Revenus] = [Taux d’endettement][Charges (non foncières)] /
([Revenus] +/- ([Loyers perçus x 0,7] – [Charges foncières]))
= [Taux d’endettement différentiel]
(500 + 580 + 1 800) / (3200 + 770 + 1575) =
2880 / 5545 =
51.9 %
=> pas finançable
Locatif 1 : 770 – 580 = 190 €
Locatif 2 : 1575 – 1800 = -225 €
190 – 225 = – 35 €
500 / (3200 – 35) =
15.8 %

Lorsqu’on a des cashflow positifs, avec cette méthode, on peut même venir faire diminuer son taux d’endettement en achetant un bien !

Et tu comprends bien ici l’intérêt de ne pas payer de loyer : théoriquement, sans charges à mettre au numérateur, il serait possible d’emprunter à l’infini.

Pourquoi c’était trop cool ?

Pour le calcul du taux d’endettement classique, celui-ci ne peut en effet être réduit que lorsque les mensualités de prêt sont déjà remboursées, faisant alors diminuer drastiquement le poids des charges mensuelles.

Le taux d’endettement « différentiel » était particulièrement favorable pour l’investissement car il permettait de ne pas augmenter le montant des charges mensuelles et donc de ne faire que très peu varier le pourcentage, puisque le cashflow fait seulement varier le montant des revenus.

Ce qui permettait d’envisager des acquisitions plus grosses, et/ou d’enchainer les investissements avec beaucoup moins de limites.

Interdiction du « différentiel »

Pourquoi ?

Auparavant, les banques fixaient le taux d’endettement maximum à 33% du revenu disponible pour accorder un prêt à leurs clients, mais cette limite n’était pas une obligation légale.

En janvier 2022, pour éviter les situations de surendettement des ménages, le « Haut Conseil de Stabilité Financière » (HCSF) a mis un tour de vis :

  • Les banques ne peuvent plus déroger à la règle du 35% (assurance incluse) de taux d’endettement.
  • La durée des crédits ne peut plus dépasser 25 ans
  • ne peuvent par ailleurs plus se servir de la méthode du calcul différentiel pour calculer le taux d’endettement d’un projet d’investissement immobilier.
  • une tolérance est acceptée sur 20 % des dossiers dès lors que le reste à vivre est assez élevé. Le reste à vivre, pour mémoire, est le montant qui reste aux ménages pour leurs dépenses du quotidien.

Les conséquences pour les investisseurs

  • Pour ceux qui n’ont pas encore remboursé l’emprunt de leur résidence principale ou secondaire, l’investissement locatif s’avère désormais bien plus compliqué.
  • On peut même dire que cette nouvelle réglementation met un gros coup de frein dans l’investissement locatif, notamment car elle touche les SCI à l’IR.

Les solutions

Augmenter la durée d’emprunt

Emprunter sur des périodes plus longues pour diminuer les mensualités et ainsi réduire leur taux d’endettement.

Emprunter en entreprise (SCI à l’IS…)

La fin du taux d’endettement différentiel s’applique également aux SCI à l’IR, mais pas (encore ?) aux SCI à l’IS (et autres entreprises qui peuvent investir dans l’immobilier, type SARL ou LMP) qui, en tant qu’entreprises, peuvent encore prétendre à un prêt professionnel pour lequel le taux d’endettement différentiel reste applicable.

Emprunter en LMNP

A vérifier, mais j’ai lu que le statut juridique de loueur en meublé professionnel (LMNP), s’agissant d’une activité commerciale imposée dans la catégorie BIC (bénéfices industriels et commerciaux), ne serait pas non plus concerné par l’interdiction du calcul différentiel. Mais vraiment, c’est à vérifier.

Vers un retour du « différentiel » ?

Le retour de la méthode différentielle est actuellement défendue par les professionnels du crédit (Cafpi…) pour atténuer la crise de l’immobilier (neuf notamment), car elle permet de plus facilement de rester sous le seuil des 35% d’endettement requis par le HCSF.

Wait & see…

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